Mon Cadeau pour Vous
Le dernier Noël
Il était une fois, Timothée, un garçon (même si c'est É-E à la fin) de 10 ans qui croyait encore au père noël.
S'il y croyait, pour sûr parce que, le père noël, c'était son père à lui !
Son père était gros, barbu, binoclard, et toujours vêtu d'une longue tenue rouge et blanche.
Il n'avait plus de maman ; elle n'était pas morte, Noëlle s'était simplement barrée un soir alors que son mari était encore rentré bourré. Oh, elle avait bien menacé de quitter le foyer conjugal deux ou trois fois avant mais, Arnolphe (le véritable prénom du père noël), lui offrait toujours des petits cadeaux qui la faisait chavirer.
D'ailleurs, il lui avait offert une croisière sur le Titanic il y a quelques années.
Noëlle Noël, qu'elle s'appelait. C'est drôle. Il faut être con pour appeler sa gosse avec le même blase que son blase.
Timothée se rappelait du soir où sa mère était devenue folle, en voyant Arnolphe comme une larve, à vomir une substance - qui servait de nourriture aux elfes - verdâtre sur la moquette.
"Ma moquette Arnolphe ! Ma putain de moquette Arnolphe !
"Che… Cherie enf.. enfin 'hic'
"JE ME BARRE ; DANSEUR, COMETE, ON SE CASSE.
"Nooon… 'hic' NOOOON, NOELLE, RESTE ENF.. ENFIN 'hic'
"Fallait réfléchir avant, raclure. De toute manière t'es fini papa noël ; ils ont tous des cheminées à l'éthanol.
"Mais tu.. tu sais bien que je passe aussi par le radiat 'hic' eur…
"Ouais.. tu veux un bon tuyaux mec ? Me rappelle jamais. JAMAIS. ON S'EN FOU DES RADIATEURS ! MAINTENANT C'EST LE CHAUFFAGE AU SOL ! A L'ENERGIE SOLAIRE ! C'EN EST FINI DE NOËL.
"Me dites pas que 'hic' je perds Noëlle… ma femme… ma si belle femme…
"Belle mon cul ouais, tu m'as jamais r'gardée ! TU M'AS JAMAIS R'GARDÉE !
"mais je.. je te regarde là… chérie… je .. 'hic' je t'offrirai des perles de plu 'hic' venues de pays où il ne pl 'heuk' pas…
"JE PARS. "ne me qu 'hic' tte pas…
Elle était partie en claquant la porte, ce qui avait fait tomber le calendrier de l'avent familial, répandant tous les jouets, sucres, bonbons et chocolats sur le tapis rouge de l'entrée. Timothée avait vu tout ça du haut des escaliers, sa petite bouille coincée dans les barreaux de la rambarde magique (en fait elle n'était pas magique, c'était juste des barreaux pour empêcher de se casser la gueule, mais on y pense jamais aux choses simples qui nous protègent ; finalement c'est quand même magique, de fabriquer des choses qui nous sauvent la vie [sauf si on saute par dessus]).
Lui, il était trop jeune pour bien saisir les enjeux d'une telle situation mais, ça le faisait bien marrer de voir son père se tortiller telle une tortillas sur la moquette. Ce n'était pour lui guère plus qu'une toupie rouge qui faisait des bruits en tournant. Qui faisait des bruits et qui vomissait.
Qui vomissait et qui clignotait. Son petit bonnet clignotait ; son véritable bonnet était décousu...
Arnolphe ne savait pas coudre. C'était sa femme qui cousait alors, puisqu'elle n'était plus là, il avait envoyé le bonnet à la cousine de Noëlle ; sa cousine cousait. Ils étaient restés en bons termes. Peut-être un peu trop car, si mes souvenirs sont exacts, ils avaient dû coucher ensemble, lors de l'after trop arrosé d'un nouvel an.
Pour ne pas faire jaser, il avait fait livrer son bonnet avec un simple mot
"Motus et bouche cousue.
La cousine l'avait très mal prit. Elle avait pensé qu'il s'était foutu de sa gueule à cause de ses multiples opérations esthétiques ; elle ne tint pas sa promesse, et ne lui renvoya jamais le fameux bonnet.
Ce qui avait finalement poussé Arnolphe à acheter en de-spee un truc « I Love Paris » rue de Rivoli, un soir qu'il rentrait chez lui.
"Ça fera l'affaire pour l'instant, avait-il déclaré.
C'était sa phrase. Quand il avait apprit que sa femme était enceinte, il avait demandé
"C'est une fille ?
"Non, c'est un garçon..
"Ça fera l'affaire pour l'instant.
Thimothée était né un 25 décembre et, Noëlle Noël en avait toujours voulu à son mari de ne pas avoir été là pour couper le cordon ; lui qui coupait du bolduc 364 jours par ans dans son atelier.
Mais Arnolphe, dans son atelier, était toujours triste.
À tout bien y réfléchir, il n'avait jamais été très heureux. Les elfes ne le faisaient rire qu'à moitié, sa femme pas du tout et,
son fils ?! Quoi, Timothée ?! Ils n'ont jamais passé de temps ensemble. Je ne suis même pas sur qu'ils se connaissent. Ni qu'ils se reconnaitraient si on les mettait l'un en face de l'autre. Ils se regarderaient surement intrigués, et se toucheraient du bout de l'index pour voir si la chose est réelle. (2001, l'odyssée de l'espace NDLR)
Le père noël gâtait tous les enfants de la terre mais n'avait aucune considération pour le sien.
Je suis mauvaise langue, un jour il lui avait offert une pomme d'amour.
Ce qu'il ignorait alors, c'est que le petit était allergique à la pomme - oh mais pas à l'amour
Arnolphe n'avait jamais eu de chance avec les pommes.
Il avait d'ailleurs en mémoire le soir de noël où un gamin l'avait attendu, éveillé, dans le salon.
"Père noël ?! avait crié le petit garçon d'une voix trop aiguë.
"T'es d'bout toi ?!
"Ben père noël ! Pourquoi tu passes par la fenêtre ! J'avais allumé la cheminée!
"P'tit con, j'entre pas dans les iPad.
C'est alors qu'est arrivé le 20 décembre, à 23h32.
La maison du père noel était bien la plus jolie. La plus éclairée. La plus magistrale. Il y avait aussi le plus beau des sapins, dans le jardin. Le plus beau sapin car il avait été planté par le jardinier personnel de la famille Noël : Alberick Windows et, Windows plantait très bien.
Timothée dormait, Arnolphe paquetait les derniers paquets. Les rennes faisaient leur sieste. La nuit était noire. Pas un souffle de vent. Il faisait très froid cette nuit là, je m'en rappelle parce que, je rentrais du MacDrive et mes nuggets avaient la chair de poule.
C'est au moment où je regardais la belle et blanche neige qu'un hurlement déchira la nuit glacée.
Un cri sortant tout droit de l'atelier du père noël…
Arnolphe venait de brâmer comme un renne.
"Ça sent le sapin ; avait-il eu le temps de déclarer.
Et puis il était mort comme un con.